jeudi 24 novembre 2011

Arrêt maladie : un choix entre santé et travail ?

Alors que l’entreprise a une obligation de résultat sur la santé des salariés, et pas seulement de moyen, le salarié lui-même renonce parfois à prendre des mesures nécessaires à sa santé, en particulier, à s’arrêter de travailler. Perte de salaire, pression de l’employeur contre les arrêts, stigmatisation lors de la reprise du poste, crainte de perdre son emploi, conscience professionnelle, solidarité vis à vis des collègues… nombreuses sont les motivations du salarié à refuser un arrêt de travail.
Pourtant sortir de l’entreprise, quand les conditions de travail se révèlent pathogènes, est une première démarche nécessaire. L’arrêt, en autorisant la mise au repos du corps et de l’esprit, permet de ne plus tenir à tout prix, d’interroger sa situation professionnelle, de la comprendre, seul ou accompagné, et enfin, peut-être, de se reconnecter à ce qui est bon pour soi-même, loin de tout idéal social prescrit et plaqué sans concertation.

L’article ci-dessous de Jean-Baptiste Chastand et Laetitia Clavreul, Le Monde, édition du 24 novembre 2011, s’intitule « Pression au travail, manque d'argent : ces patients qui refusent les arrêts-maladie » et décrit les freins exprimés par les salariés quand ils refusent un arrêt de travail.

« La question des arrêts-maladie donne décidément du fil à retordre au gouvernement. Après avoir renoncé à modifier le mode de calcul des indemnités journalières pour faire des économies, le voilà prêt à reculer sur le quatrième jour de carence pour les salariés du privé. Par deux fois, les mesures qu'il défendait ont été jugées injustes : elles touchaient les travailleurs dont l'entreprise ne compense pas la baisse de revenu liée à l'arrêt-maladie.

De quoi aggraver un phénomène observé par de plus en plus de médecins en ces temps de crise : le refus des malades de se mettre en arrêt-maladie. Un sujet peu documenté. "On en parle peu, sans doute parce que les arrêts-maladie sont un sujet tabou et qu'il est de bon ton d'estimer que les Français sont des fainéants", analyse Claude Bronner, du syndicat Union Généraliste. Ce médecin, qui se dit inquiet de l'augmentation de la souffrance au travail, voit souvent des patients qui lui font part des pressions de leur entreprise contre les arrêts.

Surtout, il y a le problème financier. Tous ne sont pas égaux devant la possibilité, ou non, de s'arrêter. Les médecins distinguent trois catégories : les fonctionnaires, assez bien protégés ; les salariés des grandes sociétés, pour lesquels il n'y a pas d'incidence financière quand ils se mettent en congé maladie ; et un troisième groupe, ceux dont les entreprises ne compensent pas les jours de carence, ni la baisse de revenu engendrée par le versement d'indemnités moins élevées que le salaire. Selon le gouvernement, seuls 30 % des salariés ne reçoivent pas de complément de salaire, un chiffre contesté par les syndicats. "Même minoritaires, ces personnes sont nombreuses quand même", insiste le Dr Bronner, évoquant les smicards pour qui gagner moins est impossible.

Ne pas pouvoir s'arrêter peut constituer un frein à l'accès aux soins. Comme les dépassements d'honoraires, le coût des complémentaires santé, ou les délais d'attente auprès des spécialistes, motifs bien connus de renoncements. A ces réfractaires, les médecins donnent des arrêts, considérant qu'ils font partie de la prescription comme les médicaments. Mais ils savent pertinemment qu'ils n'en tiendront pas compte. Parfois, les malades s'arrêtent mais repartent travailler alors qu'ils ne sont pas guéris. D'autres reportent une opération, ne pouvant se permettre plusieurs semaines d'arrêt. »

Pour lire la suite de l’article suivre le lien :
http://www.lemonde.fr/societe/article/2011/11/23/pression-au-travail-manque-d-argent-ces-patients-qui-refusent-les-arrets-maladie_1608040_3224.html

vendredi 4 novembre 2011

Risques à caractère psychosocial

Ce jour sur le Nouvel Economiste, l’article « Coaching – Les risques psychosociaux » signé Charly Masliah aborde longuement la question du mal être au travail et l’étaye de références théoriques et de témoignages.

« Le mal-être au bureau ? Voilà bien un sujet sur lequel les entreprises ne peuvent plus faire la sourde oreille. Pertes financières, déficit d’image, destruction du lien social au sein de l’entreprise… Les conséquences des risques psychosociaux pèsent lourd. Si la sonnette d’alarme a bien été tirée, peu d’actions ont encore été mises en place dans la pratique. Et les entreprises se contentent bien souvent de traiter les symptômes du mal, en soignant les blessures de leurs salariés, au lieu de s’attaquer à ses racines : l’organisation du travail et les modes de management eux-mêmes. Un défi qui demandera, certes, bien plus de courage. »

Pour lire la suite et les précisions que l’auteur apporte sur le statut de la maladie professionnelle en France : http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/coaching-les-risques-psychosociaux-12616/

jeudi 27 octobre 2011

Facebook et identité professionnelle

Une mobilisation rapide et massive via Facebook stoppe le licenciement d’une caissière accusée du vol d’un ticket de caisse. De nombreux articles relatent cette histoire qui a créé l’indignation :
http://www.francesoir.fr/actualite/societe/cora-caissiere-sauve-son-emploi-grace-au-soutien-sur-internet-151122.html

Facebook, à l’aide des salariés ? On peut s’interroger. Dans un même temps, une autre actualité démontre que s’exprimer sur ce réseau social peut tout autant conduire au licenciement :
http://elle.sfr.fr/Societe/News/Critiquer-son-chef-sur-Facebook-peut-mener-au-licenciement-1424415

Opinions, photos, commentaires publiés sur Internet sont considérés comme publics et ne relèvent pas de la sphère privée. Conjugué à l’absence de droit à l’oubli imposé par la mémoire du web, écrire sans retenu ses états d’âme, qu’ils soient critiques ou romantiques, ne laisse aucune place à la fluctuation de l’identité. Comme gravés dans le marbre, les mots choisis et utilisés à un moment T dans un contexte précis figent sans nuance possible sentiments et pensées au regard de tous.

Alors que l’identité d’un sujet n’est jamais définitivement stabilisée, mais en confirmation quotidienne dans les relations aux autres tant affectives que de travail, ne pas respecter le caractère privé de la parole écrite porte atteinte à la dynamique et à la promesse de changement que contient une personne.

La multiplication par le groupe Facebook des fonctionnalités et des rubriques de recueil d’informations (santé, emploi, relations de familles…) transforme instantanément en données publiques les confidences d’un internaute. L’article ci-dessous revient sur ces questions et rappelle qu’il relève de la liberté de chacun de donner à voir sa vie privée et professionnelle ou de les protéger :
http://www.rue89.com/2011/09/28/le-nouveau-facebook-fait-entrer-votre-vie-privee-dans-lhistoire-223871

Les réseaux sociaux sont considérés comme « incontournables » pour postuler, recruter, s’informer du marché de l’emploi. Mais, quand un salarié s’en saisit pour communiquer sur ses conditions de travail ou de management, et s’y confie à l’écrit, au détriment de la parole, emploie-t-il alors le média le plus bénéfique pour lui ?

Adresser ses difficultés à une personne physiquement présente rompt la solitude. Préférer le face à face plutôt que le Facebook pour dire ses souffrances au travail dans le cadre d’une véritable écoute participe à la restauration de la capacité de penser et d’agir.

Valérie Tarrou

mardi 18 octobre 2011

Blog de veille sur la santé au travail

Accueilli par la revue Santé & Travail, le blog de Jacques Darmon, médecin du travail et engagé à la CFDT, est une source actualisée d'informations tant juridiques, que médicales ou sociales en lien avec la santé au travail. Il partage cette veille au bénéfice de ses lecteurs et exprime sa subjectivité en toute transparence.
A découvrir : http://alternatives-economiques.fr/blogs/darmon/

mardi 4 octobre 2011

« De bon matin » il a rencontré la souffrance

Sortie mercredi 5 octobre du film « De bon matin » de Jean-Marc Moutout, avec Jean-Pierre Darroussin , Xavier Beauvois , Yannick Renier ... un film sur un conflit purement professionnel inspiré par un fait divers arrivé en Suisse.

Lundi matin, Paul Wertret, cinquante ans, se rend à la Banque Internationale de Commerce et de Financement, où il est chargé d’affaires. Il arrive, comme à son habitude, à huit heures. Il s’introduit dans une salle de réunion, sort un revolver et abat deux de ses supérieurs. Dans l’attente des forces de l’ordre, cet homme, jusque là sans histoire, s’enferme dans son bureau et revoit des pans de sa vie et les événements qui l’on conduit à commettre son acte.




Lire l’article de Rue89 : « Souffrance au travail : «De bon matin», il tue deux collègues » : http://www.rue89.com/2011/10/03/souffrance-au-travail-de-bon-matin-il-tue-deux-collegues-224354

mardi 27 septembre 2011

« Souffrance au travail : vu l’ampleur des dégâts rien en soi n’est suffisant ! »

Un écrit proposé par Alain Astouric, auteur de « La Tyrannie du marketing » (2010, Ed Ere), « Le Management durable » (2004, Ed Chronique Sociale).

Depuis deux décennies les techniques managériales de mutation organisationnelle permanente, de travail en mode projet, de réingénierie, d’empowerment* et de rémunération variable individuelle ont poussées les hommes, pardon ! les ressources humaines, vers la religion de la mobilité, la transformation permanente, la flexibilité, la polycompétence et l’individualisation des résultats au sein d’une entreprise prétendument individualisée pour le bien de tous.

Or, s’il est exact que ces évolutions peuvent offrir certaines opportunités de responsabilisation des salariés et de mise en place d’organisations moins hiérarchiques, elles font surtout peser de graves risques sur la santé mentale des travailleurs. Alors que faire en ces temps du triomphe de l’individualisme ?

Etant donné qu’on ne peut pas revenir en arrière, il est urgent de reconstruire l’entreprise. Non pas par nostalgie du passé mais parce que l’on tient là l’unique façon de réussir l’avenir.

Il est plus que temps de donner enfin à la maîtrise et aux cadres non seulement une réelle et suffisante marge de manœuvre mais aussi une formation sérieuse, complète et concrète, d’abord aux problématiques de la santé et du bien-être au travail, ensuite, et surtout, aux dix techniques qui fondent (depuis presque toujours) le management efficace d’une équipe au travail : la communication interindividuelle ; la gestion du changement dans les organisations ; la recherche de l’amélioration de la qualité ; la délégation de pouvoir ; la prise de décision ; la négociation interindividuelle ; la motivation de l’homme au travail ; la conduite de réunion ; la prise de parole en public ; l’entretien de face-à-face.

Nous sommes bien conscient que vu l’ampleur des dégâts rien en soi n’est suffisant et que la pédagogie à elle seule n’est pas la panacée. Mais si l’on n’utilise pas en premier lieu les moyens existants, ceux là même qui ont depuis longtemps fait leurs preuves, rien ne sera jamais résolu.

En outre, parce qu’en matière de relations sociales dans le travail, de conditions de travail et d’organisation du travail la démarche collective est toujours à privilégier, nous insistons sur la nécessité à former les décideurs et dirigeants ‒ surtout les plus jeunes ‒ au minimum aux problématiques de la santé et du bien-être au travail ainsi qu’à la gestion du changement dans les Organisations. De préférence à la totalité de ce même programme.

On a là un train de mesures qui en ne confondant pas prévention du stress et poudre aux yeux devrait nous permettre de regagner suffisamment de confiance et d’adhésion pour, enfin, travailler mieux.

Alain Astouric
http://astouric.icioula.org/

* La réingénierie consiste en un écrasement de la pyramide hiérarchique par disparition de la plupart des agents de maitrise et cadres de proximité. L’empowerment, au prétexte de lui offrir l’autonomie, aboutit en réalité à placer le salarié dans une position intenable entre, d’une part la stricte obligation de résultats immédiats et d’autre part le strict respect de normes, règlements procédures et processus.

dimanche 11 septembre 2011

Et si vous deveniez co-auteur du blog ?

Tout en poursuivant la publication d’articles sur l’actualité de la psychologie du travail et l’approfondissement de concepts, le blog s’enrichit de nouvelles rubriques et propose un zoom sur la souffrance au travail via une consultation et les risques psychosociaux.

Je fais appel à vos témoignages, que vous soyez un praticien ou un salarié, aux situations vécues, aux interrogations et aux avancées dans ces deux domaines afin d’enrichir les rubriques de vos contributions, anonymes ou personnalisées, à m’envoyer par mail (voir la rubrique Contact).

Ecrire, et adresser son écrit, peut constituer un premier pas pour ne pas rester seul(e) face à une situation professionnelle perturbante, pour s’autoriser à dire sa détresse, et ressentir que les conditions de travail subies commencent à porter atteinte à votre santé et à votre capacité de travailler.

Cette participation à la vie du blog ne remplacera pas le travail réalisable dans une consultation spécialisée Souffrance et Travail mais ne pouvons nous penser avec Tosquelles (1) que « c’est en faisant des choses que l’homme se fait lui-même d’autant plus que l’on ne peut pas faire quoi que ce soit sans compter sur les autres » (2).

Aussi je vous propose de faire et de faire ensemble.

Valérie Tarrou

1) François Tosquelles, psychiatre catalan (1912-1994), est l’un des inventeurs de la psycothérapie institutionnelle. « Le travail thérapeutique en psychiatrie », Erès, 2009.

2) Lire sur : http://www.psychologuesenresistance.org/spip.php?article30 la post-face écrite par Yves Clot, titulaire de la Chaire de psychologie du travail du Cnam, pour la réédition du livre de F. Tosquelles en 2009 aux éditions Erès, ouvrage publié en 1967 par les éditions du Scarabée.