vendredi 28 janvier 2011

Les suites du licenciement de Marie Pezé de la consultation Souffrance et Travail de Nanterre

Publié dans le Monde du 25 janvier 2011 un article de Bertrand Bissuel intégralement repris ci-dessous : « Une spécialiste de la souffrance au travail poursuit son employeur -La psychologue Marie Pezé attaque l'hôpital de Nanterre. Elle conteste son licenciement. »

«Licenciée en juillet 2010, Marie Pezé, l'une des plus grands spécialistes de la maltraitance dans le monde de l'entreprise, va saisir la justice pour obtenir réparation des préjudices causés, selon elle, par son ex-employeur, le Centre d'accueil et de soins hospitaliers (CASH) de Nanterre. C'est le tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui examinera sa requête.

Mme Pezé avait été recrutée en 1975 par le CASH pour y exercer des fonctions de psychologue dans le service de chirurgie. Vingt-deux ans plus tard, elle a ouvert, au sein de l'établissement, une consultation "Souffrance et travail", où des centaines de salariés en situation de détresse professionnelle ont été accueillis.

Par la suite, d'autres lieux du même type ont été créés à travers la France, donnant lieu à la constitution d'un réseau nationalement reconnu.

Atteinte par une pathologie évolutive, Mme Pezé est reconnue travailleuse handicapée à 80 % depuis la fin des années 1990. La direction du CASH a procédé à quelques aménagements pour tenter de faciliter la tâche de la psychologue. Mais son état de santé s'est dégradé - tout comme les relations qu'elle entretenait avec la hiérarchie de l'établissement. Finalement, la médecine du travail l'a déclarée définitivement "inapte" à son poste. Son reclassement dans l'hôpital a été envisagé mais l'hypothèse a tourné court. Mme Pezé a donc été congédiée.

En novembre 2010, elle a adressé au CASH une "demande indemnitaire", car elle estime avoir été lésée pour plusieurs raisons. Selon elle, la direction n'a pas pris les mesures adaptées à son handicap, ce qui a engendré du stress et du surmenage. Mme Pezé affirme également avoir été en butte à la mauvaise volonté d'une partie des cadres de l'établissement.

Enfin, elle reproche au CASH des irrégularités sur le plan administratif : elle dit avoir été rémunérée sur la base d'un mi-temps alors que sa charge de travail était nettement plus importante ; de plus, elle est restée soumise au statut de vacataire pendant plus de vingt ans. C'est pourquoi elle réclame à l'hôpital 331 000 euros de dédommagement.

Le directeur, Philippe Thomas, lui a répondu non dans une lettre datée du 12 janvier. Il fait notamment valoir que la prescription joue pour les demandes de rappels de salaires concernant la période antérieure à l'année 2006. Il s'étonne par ailleurs de "la tardivité" des doléances de Mme Pezé et souligne qu'"elle n'a jamais contesté la répartition de son temps de travail". Il juge "exorbitantes" et "infondées" les demandes d'indemnisation au titre des "préjudices moral et de santé" : "L'établissement a - ... - été attentif, dans la mesure du possible, à la mise en œuvre d'actions permettant d'améliorer les conditions de travail de l'intéressée", se défend-il.

Mme Pezé a décidé de contester cette décision devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise. Compte tenu des délais actuellement observés dans cette juridiction pour traiter les recours, l'affaire pourrait être jugée en 2012.»

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