Si travailler peut être source de souffrances, l’activité professionnelle peut également être à l’origine de plaisirs. Une même situation de travail a pu procurer de la joie avant d’évoluer vers le mal-être.
Le plaisir procuré par l’exercice de son métier s’enracine à la fois dans la réalisation d’une production ou d’un service de qualité et dans l’accomplissement qu’il permet de soi-même. Ainsi se forment les « habiletés professionnelles » (1) dans la rencontre de la subjectivité du salarié, de son objet de travail et de ses relations aux autres.
Ce point de confrontation entre soi-travail-autrui en psychologie du travail s’appelle le réel du travail. Au sein du travail effectivement réalisé, il correspond aux questionnements soulevés par des situations inattendues, aux inventions à trouver pour y répondre. Ce travail là se vit sur le mode affectif, c’est le travail tel qu’il est ressenti, vécu, souffert, à travers le monde réel qui résiste.
Il est à penser en opposition avec le travail prescrit celui de l'organisation, auquel correspondent l'aptitude et le diplôme. A cette approche théorique, le réel du travail consiste en tout ce que chacun doit ajouter sans quoi rien ne fonctionnerait.
Christophe Dejours explique que s’en tenir aux « ordres, dans une obéissance absolue, cela s’appelle la “grève du zèle” » (1) et débouche sur un dysfonctionnement complet. Il s’interroge sur la nature de ce zèle, indispensable et pourtant généralement méconnu par les gestionnaires, et rappelle que le réel du travail, cet « écart entre le prescrit et l’effectif n’est jamais définitivement comblé ».
Le réel du travail s’inscrit dans un paradoxe : indispensable à la réalisation de l’activité, il n’est pas acquis et son retour imprévu est pourtant à la fois source d’inconfort et de développement. Sans cette confrontation parfois douloureuse, ou même angoissante, voire décourageante, le sujet ne chercherait pas à trouver une réponse, à inventer un geste, à créer une nouvelle façon de faire.
Si le réel du travail sollicite les connaissances, il suppose, et peut-être même exige, de la part de tous le recours à une intelligence particulière, une « intelligence qui découvre, une intelligence qui invente ; peut-être même faut-il parfois une intelligence créatrice ». (1)
Christophe Dejours précise toute fois que le zèle est à la fois recours à cette forme d’intelligence du corps et volonté, et désir, de la mettre en action. Cette intelligence dite rusée est nommée « métis » en psychodynamique du travail, en référence à la déesse grecque Métis (2).
Le réel peut intervenir dans des situations absurdes ou cruelles, mais c’est dans cette résistance du monde réel que le sujet se sent exister, se sent vivant. Ainsi est ce dans ce rapport que le corps fait simultanément l’expérience du monde et de soi.
Valérie Tarrou
1) Dejours, C. (2009). Travail vivant – 1 : Sexualité et travail ». Paris : Payot.
2) « Métis, l’intelligence du corps » : article à venir.
Le plaisir procuré par l’exercice de son métier s’enracine à la fois dans la réalisation d’une production ou d’un service de qualité et dans l’accomplissement qu’il permet de soi-même. Ainsi se forment les « habiletés professionnelles » (1) dans la rencontre de la subjectivité du salarié, de son objet de travail et de ses relations aux autres.
Ce point de confrontation entre soi-travail-autrui en psychologie du travail s’appelle le réel du travail. Au sein du travail effectivement réalisé, il correspond aux questionnements soulevés par des situations inattendues, aux inventions à trouver pour y répondre. Ce travail là se vit sur le mode affectif, c’est le travail tel qu’il est ressenti, vécu, souffert, à travers le monde réel qui résiste.
Il est à penser en opposition avec le travail prescrit celui de l'organisation, auquel correspondent l'aptitude et le diplôme. A cette approche théorique, le réel du travail consiste en tout ce que chacun doit ajouter sans quoi rien ne fonctionnerait.
Christophe Dejours explique que s’en tenir aux « ordres, dans une obéissance absolue, cela s’appelle la “grève du zèle” » (1) et débouche sur un dysfonctionnement complet. Il s’interroge sur la nature de ce zèle, indispensable et pourtant généralement méconnu par les gestionnaires, et rappelle que le réel du travail, cet « écart entre le prescrit et l’effectif n’est jamais définitivement comblé ».
Le réel du travail s’inscrit dans un paradoxe : indispensable à la réalisation de l’activité, il n’est pas acquis et son retour imprévu est pourtant à la fois source d’inconfort et de développement. Sans cette confrontation parfois douloureuse, ou même angoissante, voire décourageante, le sujet ne chercherait pas à trouver une réponse, à inventer un geste, à créer une nouvelle façon de faire.
Si le réel du travail sollicite les connaissances, il suppose, et peut-être même exige, de la part de tous le recours à une intelligence particulière, une « intelligence qui découvre, une intelligence qui invente ; peut-être même faut-il parfois une intelligence créatrice ». (1)
Christophe Dejours précise toute fois que le zèle est à la fois recours à cette forme d’intelligence du corps et volonté, et désir, de la mettre en action. Cette intelligence dite rusée est nommée « métis » en psychodynamique du travail, en référence à la déesse grecque Métis (2).
Le réel peut intervenir dans des situations absurdes ou cruelles, mais c’est dans cette résistance du monde réel que le sujet se sent exister, se sent vivant. Ainsi est ce dans ce rapport que le corps fait simultanément l’expérience du monde et de soi.
Valérie Tarrou
1) Dejours, C. (2009). Travail vivant – 1 : Sexualité et travail ». Paris : Payot.
2) « Métis, l’intelligence du corps » : article à venir.
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